Je m’étais sincèrement promis de ne poster sur mon blog qu’un seul article par mois afin de ne pas trop encombrer vos boîtes courriel
Cependant, il m’est difficile de ne pas réagir lorsque je constate une gestion déficiente et publique, et que je peux la mettre en lien avec les préceptes de la gestion de projet que je partage.
Il s’agit en fait dans ce cas précis d’un grave manquement à la gestion des parties prenantes survenu il y’a quelques jours à Oran (deuxième ville d’Algérie) avec les conséquences que vous imaginez
Le contexte :
El Watan du 13 aout 2020 « En prévision de l’ouverture des plages, un plan de circulation provisoire a été défini par la wilaya pour réglementer la circulation entre la ville d’Oran et la daïra d’Aïn el Türck. Il prévoit en résumé de faire en sorte que dans le sens Oran – Ain el Türck, les véhicules empruntent la corniche inférieure à partir du tunnel de la Pêcherie et que, dans le sens du retour, c’est-à-dire Aïn el Turck – Oran, la circulation soit déviée vers la route de la Corniche supérieure pour une entrée de la ville d’Oran à partir de Hai Bouamama »
El Moujahid du 17 aout 2020 « Le nouveau plan de circulation entre Oran et Aïn El-Turck a été suspendu à partir de dimanche, avec la reprise du précédent système de voie à deux sens, a-t-on appris auprès des services de la wilaya. “Après l’analyse des données de la première phase de cette expérience et en réponse aux requêtes des utilisateurs de cet axe, il a été décidé de suspendre cette procédure à partir de dimanche et de reprendre la circulation dans les deux sens,” a souligné un communiqué de la wilaya. “Les services de sûreté compétents conservent le pouvoir de revoir ces dispositions en fonction des évolutions de la prochaine étape,” a ajouté le document.
Nb : L’entrée en application de ce plan de circulation a coïncidé avec la réouverture des plages et l’affluence de milliers d’estivants voulant profiter du week-end et des plaisirs de la mer
Nb 2 : Les habitants de Mers el Kebir et de Roseville (Villes située entre Oran et Ain el turk) ont même bloqués la route à la circulation pour protester contre la décision de mise en place du nouveau plan de circulation) sachant en plus que la route de la corniche supérieure est montagneuse et ne disposant pas d’éclairage de nuit.
Je ne sais même pas par quoi commencer et s’il faut débattre :
-De la problématique de la communication (l’annonce à semblerait-il été faite la veille de la mise en application sans passer au préalable par des panneaux indicateurs posés bien avant le début de la mise en application. Pour la petite histoire, je viens de passer 20 minutes à rechercher sur le web le site de la wilaya d’Oran sensé donner l’information et devinez quoi …je ne l’ai pas trouvé [je ne parle même pas de l’information, mais du site web lui-même !!!])
-De la problématique de la sécurité (je connais bien La route de la corniche supérieure et confirme sa dangerosité et elle n’a apparemment pas été préparée pour ce flux)
-De la problématique du timing (lancer un plan de circulation le jour de l’ouverture des plages après autant de restrictions me semble pour le moins hasardeux)
Et bien évidemment de la problématique de gestion des parties prenantes
Vous le savez, et selon la définition utilisée dans le PMBoK du PMI “Toute personne qui peut avoir ou subir un impact sur une décision, une activité ou un résultat du projet est une partie prenante”
Et toujours selon le PMI, ce domaine de connaissances est décomposé en 4 processus qui permettent d’augmenter les probabilités de succès du projet en cours de route :
- Identifier les parties prenantes : Il faut garder en tête que les parties prenantes s’intéressent principalement au contenu, aux coûts, aux délais et à la qualité. Il est important de voir comment celles-ci réagiront dans différentes situations.Ici, les riverains n’ont clairement pas étés pris en compte
- Planifier la gestion des parties prenantes : incluant des stratégies de gestion pour littéralement engager celles-ci et susciter leur intérêt tout au long du projet. Expliciter les bénéfices de ce changement, prévoir et faciliter la circulation des riverains au moyens de procédés d’identification, les rassurer auraient assurément augmentés les chances de succès du projet.
- Gérer l’engagement des parties prenantes : Notamment en rendant accessible l’information importante (performance, problèmes, avancement…) via les canaux préférés des gens ciblés.
- Contrôler l’engagement des parties prenantes : En s’assurant d’avoir développé de bonnes aptitudes en gestion “soft skills” : communication, facilitation, influence, négociation
Il appert clairement que l’équipe chargée de la réflexion et de la mise en place de ce projet n’a pas fait à mon sens ses devoirs notamment en matière de gestion des parties prenantes et en gestion des risques liés à ce projet (il a même été rapporté des accidents automobiles survenus à la suite de ce changement), sans même aborder la gestion de la communication qui mériterait à elle seule un article à part entière.
De plus, il eu fallu procéder à des essais, des sondages, des tests grandeurs natures afin de valider les durées de chaque trajet, un affichage important et proactif, ,..
ne l’oublions pas, l’objectif d’un gestionnaire de projet est de créer de la valeur. Celle-ci dépend des attentes des parties prenantes et de leur perception. Conséquemment, le gestionnaire de projet doit donc chercher à impliquer les parties prenantes dans la création de valeur. C’est ce qu’on appelle gérer pour les parties prenantes.
La grande différence entre la gestion des parties prenantes et la gestion pour les parties prenantes réside dans le fait que l’objectif de la gestion des parties prenantes est de gérer les attentes de ceux-ci, tout en réduisant les impacts négatifs et en améliorant le soutien offert. Il s’agit d’une mesure réactive
Si la gestion des parties prenantes sert un but véritable en employant des procédés de conformité, la gestion pour les parties prenantes, elle, est axée sur les résultats. En résumé, la première est une tentative de gérer les attentes des parties prenantes pour un projet. Le but de la seconde est de gérer le projet et ses résultats en fonction des parties prenantes et de leurs besoins et attentes
Dans ce cas précis, et sans remettre en cause la compétence des premiers responsables ou du premier responsable, je me permettrais de paraphraser un homme d’État célèbre “encore faudrait-il que l’intendance suive” ou dans sa version algérienne “yed wahda mat’ ssafak”, tout en espérant que le but de ce type de projet sera toujours en lien avec une recherche de plus-value pour le citoyen…
Et vous, qu’auriez vous fait de différent à la place du gestionnaire de ce projet ?
Je tiens à vous remercier pour la qualité des informations que vous m’avez transmises.
Votre expérience et votre point de vue sur la gestion des projets en Algérie. m’ont particulièrement intéressé.
Merci beaucoup pour vos bons mots !!
Vous parlez d’un pays où on s’adresse à des contribuables responsables, à qui les gestionnaires doivent des comptes et veillent à leur confort et sécurité. Ici, les décisions prises ont d’autres considérations très loin du citoyen, aucun respect des individus, ni une prise de conscience que la majorité des concitoyens ne sont pas éduqués suffisamment pour suivre des consignes , et j’en passe
Merci pour votre commentaire.
L’idée, à travers cet article, est de partager des expériences réelles afin que nous, managers, pensions à en tenir compte le cas échéant.
Une prise de conscience en sorte……
Merci pour votre éclairage
Merci Mourad pour cet éclairage. Pas mieux qu’une situation réelle pour comprendre la gestion des projets et surtout comprendre l’importance de l’identification et l’intégration des parties prenantes !
Au risque de me répéter , je reprends ce que j’ai déjà mis dans un commentaire d’un de tes précédents articles : les chargés des projets au niveau des Ministères , des wilayas , des Dairas , des Mairies … n’ont aucune idée sur la gestion d’un projet ni n’en connaissent les fondamentaux . Ce plan de circulation à Oran a été considéré comme une «décision» «à exécuter immédiatement».
Merci Samira pour ton commentaire.
Effectivement, les décisions administratives font laissent généralement peu de temps au gestionnaire, malgré toute sa bonne volonté, de mettre en place une gestion de projet rigoureuse.
Piste de solution: Un peu d’anticipation de leur part et/ou un peu de formation …;)
Je vous remercie Mr Zerhouni d’avoir mis l’accent sur cette défaillance que connaissent plusieurs grandes villes du Pays et plus particulièrement Alger et Oran. Je vous propose de communiquer votre réflexion aux collectivités locales concernées en l’occurrence la Wilaya et la Daira pour ce cas précis. Par ailleurs, le centre national de prévention et de sécurité routières (CNPSR) pourrait éventuellement organisé des colloques ou des journées d’études auxquels vous pourrez prendre part pour sensibiliser les protagonistes à cette logique «de Gestion de projet».
Merci pour votre beau commentaire !
J’adorerais contribuer à ce type de sensibilisation…
Si vous avez une piste, marhaba
Merci pour votre réflexion ça éclairci de plus en plus la nécessité de réflichir en gestion de projet tout le temps, dans chaque pas ou chose à réaliser ou a entreprendre que ça soit pour un compte personnel ou pour les autres donc la gestion de projet est omniprésente pour le seul but de prévalu ou pour une valeur ajouté.
Merci pour votre commentaire!
Il est bon en effet de raisonner projet pour toute initiative jamais entreprise, qu’elle soit d’ordre personnelle ou professionnelle.
D’une manière générale, et à partir du moment ou cela concerne beaucoup de personnes ( parties prenantes),il faut VRAIMENT faire, entre autres, l’exercice de penser à les gérer.
Merci pour le partage; il n’y a pas mieux qu’un cas réel pour bien illustrer les principes fondamentaux de la gestion de projet ainsi que les impacts de leur négligence.
La question à se poser dans ce cas précis : est-ce que cette décision a fait l’objet d’un projet bien défini dont la portée, l’échéancier, le budget , ….ont été considérés et analysés ou c’est une décision prise sur un coin de table en sirotant un café à la menthe?
Merci à vous pour votre intérêt et votre commendataire.
Je pense plutôt en fumant un café pour paraphraser notre ami du journal Liberté (je crois)